La Rue Valée  - par Roland Di Napoli  - 

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Situation de la Rue Valée, entre la Rue Gambetta et la Rue d'Austerlitz, au flanc de la colline ouest de Philippeville :

Extrait du plan de 1961

Entre,

Rue Gambetta Rue Austerlitz

Voici,

La Rue Valée

Ecoutons ce que nous raconte Roland Di Napoli :

"La portion de la rue Valée qui constituait les eaux territoriales de mes six ans s'étendait de la boulangerie Falzon à la pharmacie Cesarini. Entre ces deux pôles du monde connu se succédaient divers petits commerces : Madame Charles qui vous pesait sur sa balance Roberval les oranges d'hiver : Thomson, sanguines, puis oranges douces ; les abricots aux noyaux précieux pour nos jeux et nos échanges, les nèfles, le raisin dont le parfum annonçait la rentrée… Sur le même trottoir, la grande épicerie du très myope Monsieur Missud, passionné de cinéma amateur, connaissant tous les secrets du 9,5 et du 16 millimètres et heureux possesseur d'un projecteur Cinégel que j'enviais fort car mon père ne disposait que d'un modeste Pathé-baby à manivelle dont la magie pourtant enchante encore mes souvenirs.
Juste à côté : le salon de deux coiffeurs pour hommes, et l'on n'y attendait pas longtemps son tour en parcourant les photos de Match ou de Radar dans une atmosphère fleurant l'O-Cap et la brillantine Roja, avant de ressortir tondu de frais comme sur les photos de classe. Cliquez ici pour visionner : Salon Colatrella
Un peu plus loin, la droguerie Cavalié dont la vitrine, une fois, exhiba fièrement un splendide instrument de publicité pour la peinture Valentine : un bidon déversait indéfiniment son précieux contenu grâce à un habile procédé de tuyau transparent et de pompe imitant parfaitement la réalité et me remplissant d'admiration. Une autre fois Monsieur Cavalié, qui avait le sens des affaires, organisa une vente de "tout à mille francs" – en francs de l'époque, bien sûr, de cette époque où La Dépêche de Constantine et de l'Est algérien, comme le psalmodiaient les petits crieurs du matin, coûtait vingt-cinq francs.
Encore quelques pas et l'on trouve la charcuterie Mezziane, splendide entreprise kabyle dont la partie boucherie s'ouvrait de l'autre côté de la rue Gambetta, à l'orée du quartier musulman, avec ses belles peintures murales représentant moutons et solides vaches normandes sur fond de djebel.
Et puis, sous les escaliers du marché, une petite échoppe où l'on trouvait le journal et les œufs du jour.
Chaque matin, pour aller en classe, je montais le long de ce marché la rue Bélizaire, passant près de l'épicerie du Mozabite, qui, avant Internet, livrait les commandes à domicile, puis devant la cordonnerie du vieux Monsieur Lolli qui examinait toujours d'un œil sombre les chaussures à réparer avant de laisser tomber une date sans appel.
Une volée d'escalier et c'est la rue du Troisième Bataillon d'Afrique et l'Ecole Ferdinand Buisson ; Monsieur Di Rosa est déjà arrivé car je vois sa Peugeot 202 noire garée sur la droite dans la légère pente qui rejoint la rue d'Austerlitz.
Plus tard, je suivis un autre itinéraire pour aller au Lycée Luciani, m'arrêtant au retour rue Galbois devant les rayons de l'Office de diffusion du Livre qui s'était installé vers 58, puis m'attardant dans le hall de l'Empire pour découvrir les photos des films annoncés. L'été d'ailleurs, quand on cherchait sur les balcons un peu de fraîcheur nocturne on pouvait bénéficier gratuitement de la bande sonore d'Autant en emporte le vent, ou des Derniers jours de Pompéi…
Mais la rue Valée c'était aussi dès l'aube, en raison de la situation du marché, le bruit des sabots, des grelots et du roulement des carrioles venant des jardins alentour. Puis, un peu plus tard dans la matinée, le passage de la camionnette de glace stationnant de loin en loin et où les heureux possesseurs d'une glacière – en ces temps où les réfrigérateurs étaient un luxe – pouvaient se faire débiter un morceau de ce marbre ruisselant afin de conserver le froid pendant deux ou trois jours.
Nos enfants ne connaîtront jamais ces bonheurs d'une autre époque. "

Le Marché

Et Hélène Criscuolo nous écrit : "J'ai aimé la rubrique sur la vie de la rue Valée, très bien rendue. J'y passais tous les jours pour aller au lycée et quand j'étais plus petite ma mère m'envoyait parfois à la boucherie Hauger ; c'était l'aventure parce que je devais traverser la rue d'Austerlitz ; elle surveillait du balcon que je toune bien la tête à droite puis à gauche... La rue Valée, c'était aussi le Bazar de l'Empire dont nous attendions avec impatience la vitrine de Noël. A droite celle des garçons que je trouvais terne avec ses "meccano" , trains etc.. comparée à celle de gauche où Madame Ripoll avait exposé les poupées Bella qui tendaient en souriant leurs bras potelés aux petites filles. Le choix était long et difficile, et il fallait s'attarder dans leur contemplation, pour choisir, dans l'oubli total de ce qui se passait autour de nous."

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Il vous attend :     ...

Nous comptions particulièrement sur ceux de Jean Pierre MARMORATO, lui aussi habitant de la rue Valée... Eh bien... les voici :

Bonsoir Suzanne, bonsoir à tous. La rue Valée décrite sur le site par notre ami DI NAPOLI l'a été depuis le cinéma Empire vers le marché "français" ; mais pour ma part je vais continuer vers le quartier musulman, car j'y habitais en plein milieu au n°62.
Pour commencer, au coin des rues Valée et Gambetta le MONOPRIX et en face la boulangerie BOULKROUCHE. Allons vers le n°62 côté droit les farines et café LIOTARD côté gauche ; à droite une petite épicerie européenne dont le nom des propriétaires m'échappe et la boucherie/charcuterie MATTERA ; côté gauche une bijouterie et une autre épicerie dont le propriétaire, un français, nous avait hébergés un soir de Pâques vers 20hrs...! l'armée avait bouclé le quartier car une patrouille avait été la cible de terroristes, le nom de cette personne ne me revient pas en mémoire, et pourtant c'est grâce à elle si nous avons échappé à la fusillade. Plus loin sur la gauche une laiterie/fromagerie, puis une boucherie tenue par ABDELAZIZE et faisant coin avec la rue de France un marchand de légumes et fruits ; en face les magasins d'approvisionnement des armées de Terre de l'air et de mer, puis la boucherie MEZIANE Père. Continuons notre promenade..! Coin gauche le café maure, l'Hôtel du Sud et en face de celui-ci les bains maures. Avançons encore.. Nous arrivons au 62 dont l'immeuble appartenait à la famille MECHTOUF ; nous habitions au premier étage et avions comme voisins les familles CASTIGLIONNE (Photographe de la rue Valée côté français, Mme SAVONNA et son fils DI PALMA Jean-Louis que je recherche sans succés depuis plusieurs années maintenant et que j'ai vu à TOULON pour la dernière fois en 1965 ; puis la famille VITIELLO et au second les familles GUIRINGHELLI, BERNARD et ARDISSON, et, au rez de chaussée la boulangerie POLESE frère du boulanger de la rue Gambetta, une gargotte "restaurant musulman" et la boucherie du MAROUI Père du boucher cité précédement ; face à nous, un marchand de beignets, zlabias et maqrouts, puis d'autres épiceries, marchands de légumes et boutiques musulmanes. On avait aussi, le nouveau marché avec son commissariat et ...tout au bout de la rue : les maisons closes.
Il est vrai que tout cela fait ressurgir des souvenirs mais il est également triste que la mémoire efface des noms, des faits, des lieux.
Aussi pour cela merci à vous tous de nous permettre de perpétuer le souvenir de PHILIPPEVILLE."
Jean-Pierre MARMORATO.

Pour suivre le chemin de Jean Pierre

Pour lui écrire :

01-12-2004 : De Jacky Colatrella : "Bravo pour cette description de la rue Valée. Je suis Jacky Colatrella et j'habitais au numéro 40 de cette rue. Le salon de coiffure dont vous parlez était celui de mes parents, Laurent et Edith. Il y avait effectivement deux entrées l'une pour les dames et l'autre pour les messieurs. C'était le rendez-vous des supporters de l'Etoile Jeunesse Philippevilloise avec Mimon, Totor , Simoneau et les autres..." Et comme Roland l'a titillé pour extirper de sa mémoire plus de détails... allez sur la page suivante, si vous ne l'avez pas encore fait : le salon de coiffure

Et les autres rues ?...A vos plumes !